Il y a quarante ans, le 18 septembre 1981, l’Assemblée nationale adoptait le projet de loi portant abolition de la peine de mort présenté la veille par le garde des Sceaux, Robert Badinter. L’occasion de revenir sur l’opposition de la CFDT à la peine capitale.
Nombreux sont les intellectuels et les hommes politiques à s’être opposés à la peine de mort par des écrits, discours ou plaidoiries. Si sur la période 1976-1981 peu de notes et déclarations de la confédération CFDT concernent exclusivement la peine de mort, nombre d’entre-elles condamnent la violence - en réaction à des événements (agressions, attentats, incendie des locaux de la Ligue des Droits de l'Homme, etc.) -, la répression syndicale et la restriction des libertés.
En septembre 1976, une première note du secteur confédéral Action revendicative, adressée au Bureau national, précise - bien que le sujet n’ait pas été débattu en interne - que « [...] L’opposition à la peine de mort semble bien être pour la CFDT une position de principe qui aille de soi [...] ». Le secteur confédéral s’inquiète du climat de violence et de répression d’alors qui tend à « […] convaincre l’opinion publique qu’une politique répressive est la condition du maintien de l’ordre. […] » et que « […] le rejet du dernier recours en grâce par le Président de la République est le signe que l’opinion publique glisse et accepte… […] »[1]. La Commission exécutive charge alors le secteur Action revendicative, en lien avec le secteur Politique, de réunir des éléments d’information à fournir aux organisations pour argumenter leurs positions auprès des travailleurs et maintenir le consensus des militants sur cette position de principe.
En 1977 à la publication du rapport « Réponses à la violence » du Comité d'études présidé par Alain Peyrefitte, garde des Sceaux, dressant un panorama de la violence en France, le Bureau de recherche et d'action économique (BRAEC) émet quelques suggestions. La note se conclue par la dernière recommandation du rapport : « Proposer l’abolition de la peine de mort et dans le cas où le législateur prendrait une pareille décision, (…) son remplacement par une peine dite de sûreté. »[2]
Entre 1978 et 1980, plusieurs propositions de lois ou amendements tendant à abolir la peine de mort sont déposés à l’Assemblée nationale, notamment par le député abolitionniste RPR Pierre Bas, puis par le groupe communiste et le groupe socialiste. Ils n’aboutissent pas.
Dans ce contexte, la CFDT se prononce fermement pour l'abolition de la peine de mort par des déclarations[3] de juin 1979 et de novembre 1980. À l’été 1979, elle critique l’inaction du gouvernement, ainsi que l’inefficacité et la barbarie du maintien de cette pratique pénale. Pour elle « […] Le véritable combat à mener est celui pour une société capable de surmonter l’aliénation, les injustices et les inégalités, sources de conflit. »
Déclaration de la CFDT sur la peine de mort, 25 juin 1979 (CH/8/123)
Un an et demi plus tard, en novembre 1980, après l’examen du projet de loi « Sécurité et liberté » défendu par le garde des Sceaux et le rejet de deux amendements abolitionnistes, elle réitère son « […] opposition résolue à la peine de mort […] », déplore de nouveau l’inertie du gouvernement et réprouve les nouvelles condamnations prononcées en pleine campagne gouvernementale sur la sécurité.
Déclaration de la Commission exécutive sur la peine de mort, 28 novembre 1980 (CH/8/123)
Après le 9 octobre 1981, et la promulgation de la loi portant abolition de la peine de mort par François Mitterrand, nouvellement élu à la Présidence de la République, quelques articles - rappelant les positions confédérales ou commentant l’actualité liée à la peine capitale - paraissent dans Syndicalisme Hebdo et CFDT Magazine. Dans le numéro 1880 de Syndicalisme Hebdo du 24 septembre 1981, est reproduit un extrait du communiqué des personnels CFDT de l’administration pénitentiaire (SNAPP-CFDT) soutenant l’abolition mais craignant que lui soit substituée une peine perpétuelle : « L’espoir d’une libération anticipée doit continuer à habiter le détenu, faute de quoi la mission de le garder deviendrait extrêmement dangereuse, voire impossible. »[4]
Acquis en France, le combat contre la peine capitale et pour la défense des droits de l¹homme se poursuivit en dehors des frontières nationales. Ainsi, la CFDT est à l’initiative, ou participe, à des mouvements et actions internationales, en lien notamment avec la Confédération internationale des syndicats libres (CISL) puis de la Confédération syndicale internationale (CSI).
Dessin de l’illustrateur Laville paru dans CFDT Magazine, octobre 1981, n°54, p. 14 (CJ/8/6).
Crédit : Laville / Coll. Archives CFDT
Parmi ceux-ci, on peut citer :
Aujourd’hui encore, plus d’une cinquantaine de pays pratiquent la peine de mort.
Pour aller plus loin :
[1] Archives confédérales, CG/9/75.
[2] Archives confédérales, CJ/34/27.
[3] Archives confédérales, CH/8/123.
[4] Archives confédérales, CJ/43/6.